Portraits de formateurs

Portrait #7 : Claudie Mallet

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Je suis Claudie, Bibas classe supérieure, j’occupe le poste de gestionnaire de collection en Histoire de l’art, Archéologue, Religion et Cinéma depuis peu au SCD de l’université Panthéon Sorbonne.
Dès ma prise de poste en tant que Bibas en 2008, j’ai commencé à former des L1 de Droit dans les bibliothèques de licence où je remplaçais une collègue en congé maternité. J’ai ensuite formé des L1 dans plusieurs disciplines de sciences humaines -tout particulièrement les historiens- et également des L2 en Histoire de l’art pour la constitution d’une webographie. Pour la 2e année consécutive, je conçois et coanime, avec l’adjointe au Service Appui à la recherche, une formation sur l’usage des images dans les thèses.

Depuis votre entrée dans le monde des bibliothèques vous avez donc toujours fait de la formation ?
Non, quand j’étais magasinière, je ne faisais pas de formation. C’est dès que je suis passée Bibas.

Quand vous étiez magasinière, la formation vous tentait déjà ?
Je ne sais pas. C’est surtout que ça me frustrait de ne pas pouvoir faire tout ce que j’aurais pu faire en bibliothèque alors, dès qu’il y a eu la possibilité de faire des formations… ça m’offrait un panel de compétences supplémentaires donc j’ai été partante même si au départ j’avais un petit peu peur !

Qu’est-ce que la formation pour vous ?
C’est la transmission de connaissances et de compétences qui permettront ensuite à l’étudiant d’être autonome, de gagner en autonomie et le but bien sûr c’est que l’étudiant s’approprie ces connaissances pour les utiliser dans ses travaux (des exposés ou un travail de recherche, un dossier…) C’est aussi donner envie d’apprendre aux étudiants ; c’est permettre d’attirer leur attention sur ce qui leur sera utile  dans leur travail, dans leur travail de recherche.
Former, pour moi, c’est aussi s’adapter au profil des étudiants parce que, forcément, les primo-arrivants ne vont pas du tout avoir les mêmes attentes et on ne va pas du tout avoir la même approche qu’avec les doctorants. Pour des licences qui débarquent à l’université, l’interaction est très importante ;  c’est pour cela je n’hésite pas à solliciter les étudiants, les L1, les primo-arrivants mais pour qu’ils participent, j’essaie toujours de les mettre en confiance, de leur donner envie de participer et puis d’échanger avec la formatrice que je suis pour les mettre dans un climat plaisant, agréable.
Ce qui m’intéresse aussi dans la formation c’est chercher, expérimenter, tester de nouvelles méthodes, chercher de nouveaux exercices pour finalement trouver les informations et les connaissances qui seront utiles aux apprenants. Une formation, ça doit être assez rythmé par la transmission de connaissance, ensuite exercice, ensuite quiz, ça ne doit pas être du tout ennuyeux. Le visuel est important aussi dans les informations que l’on projette. Un beau visuel pour des primo-arrivants, des choses assez ludiques, interactives et les mots sont importants parce que c’est quand même un exercice de communication.
Ça doit être un moment agréable pour les étudiants et utile et nécessaire dans leurs apprentissages. C’est du relationnel, du fond et de la forme.

Une technique que vous aimez bien utiliser ?
Les techniques participatives sont quelque chose d’assez stimulant mais j’aime aussi  l’idée de les faire travailler en groupe :  parfois ça les stimule, en fait. Il y a quelque chose au sein d’un groupe qui se produit qui ne se serait pas passé s’ils avaient été tous seuls à réfléchir.
J’aime bien quand on utilise des outils, des quiz dynamiques quand on utilise des outils comme Wooclap pour connaitre un peu leurs attentes.
C’est important qu’il y ait un échange et moi j’aime utiliser des termes imagés et parlants, des métaphores. Par exemple je me souviens d’un collègue qui utilisait comme métaphore pour parler de notre portail de ressources électroniques Domino, « c’est comme si vous étiez dans un grand centre commercial, il faut aller dans un magasin précis pour trouver le bon produit »… donc je trouvais que pour un portail de ressources électroniques, ça fonctionnait assez bien. Quand on a un outil de découverte, je leur présente quelque chose qu’ils connaissent déjà, par exemple Google, pour leur montrer les différences et du coup leur présenter ce nouvel outil avec ces différences-là qu’ils ne connaissent pas encore. C’est toujours bon de se référer à des choses qui leur parle et qu’ils connaissent en fait.

Le(s) public(s) préféré(s) ?
Moi j’aime bien les primo-arrivants surtout en début de semestre parce qu’ils découvrent tout. Parfois ça peut être un public légèrement plus agité mais il faut justement les impliquer dans la formation, les convaincre que l’information va leur être utile et va vraiment leur servir en leur présentant évidemment les objectifs et surtout leur donner envie de fréquenter la bibliothèque .
Le public de doctorants,  pour moi, c’est complètement différent  car  il faut vraiment être très pointu et la formation est là pour répondre à toutes leurs attentes et leurs véritables besoins. Je trouve que quand on forme des doctorants, le support est très important il doit être aussi exhaustif que possible à mon sens ou il doit leur donner la possibilité de se réorienter vers d’autres  formations, vers d’autres documents. Les exigences, les objectifs ne sont pas tout à fait les mêmes mais les deux sont intéressants. Une formation pour doctorant demande beaucoup de travail en amont en fait et c’est ça qui permet d’être à l’aise le jour J.

Comment s’est fait le passage à la formation à distance, ces deux dernières années ?
La formation à distance m’a d’abord fait très peur, je ne connaissais pas l’outil Zoom et j’ai donc obtenu une formation en urgence avec la responsable du service de formation pour mes collègues et moi-même. Ça été heureusement bénéfique donc j’ai été plutôt satisfaite de ces formations où il me semble que j’ai quand même réussi à gérer l’aspect technique convenablement (malgré un petit stress, mais bon, ça s’est fait !). Et j’ai été vraiment ravie de retrouver des visages parce que c’était un moment où tous les étudiants étaient masqués ; j’avais la chance que les étudiants mettent souvent leur vidéo- donc je pouvais enfin revoir des visages non masqués.
Mais bon, Je préfère quand même le présentiel.

Le meilleur souvenir et le pire souvenir de formation ?
Le meilleur souvenir, je crois, était ma première formation de Droit post confinement parce que les étudiantes – c’était essentiellement des jeunes femmes- , étaient très contentes il me semble de retrouver une formatrice en chair et en os.  Donc je me souviens très bien que ça s’était particulièrement bien passé, c’était particulièrement agréable et le pire… Je n’ai pas de souvenir très clair et ni date…ce n’est pas resté imprimé dans mon esprit mais le pire c’est souvent quand un accès à une ressource est coupé ou quand par exemple -ça m’est arrivé sur Europresse- le site change du jour au lendemain, on ne peut pas le présenter tel qu’on l’aurait imaginé du coup on est un peu à la peine et on doit s’adapter.

Quelle(s) formation(s) a (ou ont) été cruciale(s) dans la construction de la formatrice que vous êtes ?
Ça va plutôt être de l’ordre de l’anecdote mais je me souviens d’une formation de Droit où un étudiant m’avait demandé comment on pouvait avoir une idée globale de tout ce que proposait Encyclopaedia universalis dans un domaine. Je me souviens : au départ, on ne m’avait pas du tout informée de cette astuce pour avoir une visibilité globale et j’avais trouvé l’astuce et, de fait, j’avais pu lister tous les articles dans un domaine particulier (c’est très simple en réalité mais quand on n’y a pas été confronté au départ… je pensais que ça n’existait pas) et ça a développé un peu ma curiosité pour toujours tester des ressources pour être à l’aise avec toutes les potentialités que ça offre.

En tant que formatrice, quel personnage de fiction seriez-vous ?
J’au pensé à John Keating , du Cercle des poètes disparus, parce que je trouve que, quand on est formateur, il faut donner envie d’apprendre, apparaitre sous son meilleur jour,  avoir des échanges fluides, être accessible et être évidemment motivé et pourquoi pas passionné comme John Keating.
Là, je vais faire allusion à quelque chose de plus personnel, c’est-à-dire que John Keating évoque aussi deux très bons instituteurs, deux merveilleux instituteurs que j’ai eus en CE2 et CM1 et je me souviens que ces instituteurs-là m’avaient fait aimer la poésie, ils me faisaient chanter, ils me donnaient envie d’aller à l’école. Donc c’est ce personnage d’enseignant, masculin en l’occurrence, inspirant et qui m’a vraiment donné confiance en moi, ce que je n’avais pas à l’époque.

Le lieu de formation de vos rêves ?
C’est très terre à terre, pas du tout un lieu imaginaire : la Bibliothèque Publique d’Information en fait, pour tout ce qu’elle incarne ; c’est un lieu d’autoformation, de formation, c’est une bibliothèque qui a révolutionné le monde des bibliothèques, elle est riche d’une actualité culturelle intense et d’une actualité bibliothéconomique et j’aime bien ce lieu de savoir.  La BPI est accessible à tous -ce n’est pas un temple du savoir- , elle accueille, forme et n’exclue pas. Même si c’est un bien grand mot de dire ça, il y a une forme d’idéal en fait… Enfin, je ne dirais pas que j’idéalise cette bibliothèque mais à son époque elle a montré autre chose des bibliothèques : un lieu généreux qui accueille tout le monde. Elle a montré autre chose que la vieille bibliothèque pour érudits, savants…

Si vous aviez des moyens illimités que mettriez-vous en place ?
Je pense que je ferais intervenir des spécialistes, des personnes qui sont aussi de grands vulgarisateurs dans les sciences dures, je pense à des gens comme Stephen Hawking, des gens qui ont été de très grands vulgarisateurs.
Je mettrais aussi en place des outils high-tech ;  pourquoi ne  pas travailler avec des modélisateurs de jeux vidéos, ceux qui sont vraiment des professionnels du jeu vidéo pour créer un serious game.

Qu’est-ce que vous faites maintenant que vous ne faisiez pas au début ?
Je n’oublie pas de me présenter,  je tourne aussi dans les rangs et je leur demande assez souvent si tout va bien pour savoir s’ils suivent. J’essaie d’être beaucoup plus dans le dialogue avec eux. Tout cela est venu avec le temps, le temps que ça m’a pris pour être à l’aise.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à la formatrice débutante que vous étiez ?
Je lui dirais qu’il ne faut pas qu’elle hésite à se lancer, qu’elle ait peur, qu’elle ait des doutes sur son envie de former des personnes plus jeunes qu’elle parce que former des jeunes adultes, je trouve que c’est très différent que de s’adresser à des enfants. Les enfants, on a toujours en tête le rapport de maître-élève, le rapport d’autorité et c’est vrai que quand ce sont des jeunes adultes, ce n’est plus trop pertinent. C’est tout autre chose. Moi je ne me suis jamais tournée vers l’enseignement.  Ce rapport maître-enfant, ça n’aurait pas été possible pour moi et en revanche le rapport formateur-jeunes adultes, c’est quelque chose que je trouve très enthousiasmant, qui me correspond mieux.

Vous travaillez sur des collections et à côté vous faites de la formation. Comment voyez-vous le rapport entre ces deux missions ?
Moi je vois ça comme un tout par ce qu’en fait, ça permet d’être à l’aise avec tous les outils que propose la bibliothèque, notamment tous les outils numériques ; ça permet aussi parfois d’avoir une curiosité pour les sites web, et aussi de signaler au service de la documentation électronique des ressources dans nos domaines parce qu’on est plus pertinent, on connait plus de choses donc c’est vraiment un tout pour améliorer le service rendu aux lecteurs.
Ça sert aussi dans un cadre de service public car on est plus à l’aise sur les outils on est plus à l’aise pour parler du service de formation donc c’est quelque chose de global.
j’ai apprécié aussi d’avoir cette ouverture sur le service Appui à la recherche qui m’intéresse parce que je trouve que ça nous permet d’être bien informé sur toutes les questions juridiques qui sont complexes et d’être à niveau sur ces domaines. Ça m’a quand même apporté beaucoup de choses, même d’un point de vue de connaissances plus larges.  j’ai plus de connaissances grâce à ce travail de formatrice et je pense que je suis plus apte à accueillir les lecteurs en service : je sens que c’est global.

(Entretien réalisé le 12 avril 2023)

Anne Guichard-Cazenave

Responsable du service de Formation des Usagers au SCD de l'université Paris I Panthéon-Sorbonne. Formations, rock'n roll & biquettes

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